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François Gauchenot : Gare à la « connivence silencieuse » !

François Gauchenot nous a quittés récemment. François était l’un des trois membres fondateurs du Cercle Suisse des Administratrices. Il a témoigné de son expérience d’administrateur dans un livre publié en 2021 “100 témoignages sur la gouvernance d’entreprise” Editions Humensis. Il nous met en garde contre la “connivence silencieuse”. Pour lui rendre hommage, nous publions ici son texte.

 

François GauchenotGare à la « connivence silencieuse » ! par François Gauchenot
Publié dans l’ouvrage « 100 témoignages sur la gouvernance d’entreprise, Editions Humensis

Dans la famille « administrateur » j’ai expérimenté la pratique de deux catégories :
• – administrateur des entreprises que j’ai créées moi-même ou à la création desquelles j’ai participé,
• – administrateur bénévole de deux associations caritatives et administrateur indépendant rémunéré d’entreprises dont je n’étais pas actionnaire.

J’allais oublier que j’ai aussi été administrateur salarié de filiales du groupe bancaire dans lequel j’ai occupé un temps une fonction directoriale, mais je n’ai jamais eu l’impression d’y faire autre chose que de la « compliance », qui n’est qu’une composante à mon avis mineure – bien que nécessaire – de la gouvernance.

J’ai vécu la première catégorie comme une composante essentielle de la création et du développement entrepreneurial, avec une continuité parfaite entre la dimension management, pour faire avancer le bateau, et la dimension gouvernance, pour trouver les meilleures routes de destinations et ultimement négocier les fusions ou cessions.

Dans la majorité des cas, les administrateurs-fondateurs que nous étions ont été assez rapidement épaulés – ou encadrés suivant les points de vue – par des administrateurs représentant les organisations, notamment des institutions financières, que nous avions pu faire souscrire à une augmentation de capital. Nous avons, au début, vécu un peu cet élargissement de notre gouvernance comme une contrainte réductrice de liberté, il s’est par la suite révélé un précieux moyen d’optimiser les conditions de sortie.

La deuxième catégorie, dans sa composante bénévole, a été bien sûr un plaisir d’ouverture et de satisfaction morale, mais aussi, en ce qui concerne le bénévolat, la confirmation du risque inhérent à la pratique d’une gouvernance « allégée ». J’ai dû au bout de plus d’un an de présence à un conseil prendre la décision de démissionner lorsque j’ai découvert que des salariés de l’organisation avaient mis en place un fonctionnement médical irrespectueux de certaines contraintes administratives nationales.

Enfin, le rôle qui me paraıt le plus porteur de potentiel en matière de gouvernance est celui de l’injection dans un conseil par un administrateur expérimenté, compétent et indépendant, d’une bonne dose d’esprit critique, et du souci de chasser les risques du péché de connivence silencieuse, péché qui sous une apparence flatteuse met en réalité le président de l’entreprise dans un risque extrême.

(c) François Gauchenot (HEC 1970)
Fondateur et dirigeant de la société suisse d’études et de conseils Saint George Institute SA, membre du bureau du Club Gouvernance HEC Alumni.